Les histoires de Nanou

Les histoires de Nanou

Contes


Le Prince et le Dragon

 

 Il était une fois, pas très loin d’ici, un prince qui faisait une cour très déterminée à une jeune fille. Il usait de tant de moyens pour lui plaire qu’il était devenu une référence dans les bouquins d’économie au chapitre « marketing et créativité ». Il lui avait offert un jardin suspendu où ne poussaient que ses fleurs préférées, un cheval docile à la robe brillante qui l’emmenait là où elle voulait (et faisait un détour par le château pour qu’il puisse l’apercevoir), des robes de grands couturiers et les chaussures qui allaient avec. Il avait même donné son nom à une étoile lors d’une cérémonie somptueuse à laquelle tous les sujets du royaume avaient été conviés. Il organisait des rendez-vous toujours plus fous, dans des endroits improbables et selon lui romantiques. Comme ce soir où il l’invita à pique-niquer au sommet d’une montagne, lui offrant comme final, sur fond de clair de lune, un splendide feu d’artifice.

 Mais curieusement, la jeune fille restait sourde à ses techniques de drague toujours plus imaginatives et sophistiquées. Leurs rendez-vous se terminaient invariablement de la même façon :

- Prince, c’est impossible entre nous.

 

 Il ne se décourageait pas, car il était convaincu qu’elle était faite pour lui. Pourquoi ? Il avait fait un rêve dont il gardait un souvenir très vif : une averse venait d’être balayée par le vent, le ciel bleu se reflétait dans les flaques d’eau que la pluie avait laissé derrière elle. Une fille s’amusait à y sauter à pieds joints. Elle était vêtue d’un bustier en velours rouge et d’une longue jupe rose en satin chatoyant qu’elle ne se préoccupait pas de voir trempée. Il s’était réveillé avant de voir son visage mais l’image de cette tenue particulièrement originale ne l’avait pas quitté. Et lorsqu’il avait rencontré la jeune fille pour la première fois en allant déposer ses bouchons en plastique dans le container adéquat, elle portait très exactement la même tenue. Ses boucles brunes qui brillaient à la lumière des néons du supermarché avaient fini de faire fondre son cœur.

 

 Ses parents commençaient cependant à être incommodés par cette romance qui amusait tout le royaume. Il ne se passait pas un jour sans qu’il ne fasse une folie pour conquérir sa belle. Mais ils ne parvenaient pas à faire entendre raison à leur fils.

- Tu te rends compte de l’empreinte carbone de ton dîner aux chandelles à Rome ? Je ne peux pas continuer à augmenter les impôts pour payer tes bêtises.

- Ce ne sont pas des bêtises. On parle de la future Reine.

- Elle n’arrête pas de te dire non, tu n’as donc pas d’estime de toi ? intervint sa mère

- Si. Et mon estime sera récompensée quand elle aura enfin succombé.

- Qui te dit qu’elle succombera un jour ?

- Je le sais, c’est tout.

 

 Ce soir-là, il l’invita au cinéma. Mais pas n’importe quel cinéma : un cinéma 5DY. Qu’est-ce qu’un cinéma 5DY ? Un cinéma 4DX, avec les acteurs en chair et en os.

 Pendant le film, il ne cessa d’observer son visage captivé par l’action et Bradley Cooper. Lorsqu’elle finit son pop-corn, il lui tendit le sien. Et lorsque les acteurs quittèrent la scène/écran et qu’ils se retrouvèrent seuls, elle se tourna vers lui et lui dit :

- Prince, c’est impossible entre nous.

 Il était atterré. Il pensait réellement que cette soirée serait la bonne. Pour la première fois, ses certitudes commencèrent à vaciller. Allait-elle un jour lui dire oui ? Elle s’était levée et terminait de boutonner son manteau pour partir lorsqu’il lui posa la question qu’il ne lui avait jamais posée :

- Pourquoi ?

 Il vit qu’elle était décontenancée car sa main resta suspendue dans le vide.

- Mais… Tu ne le sais donc pas ?

- Je ne sais pas quoi ?

- Pourquoi je ne peux pas accepter d’être avec toi.

- Arrête de me torturer, dis-moi donc pourquoi, que l’intrigue commence enfin.

 Elle se rassit et se tourna vers lui pour lui dire :

- C’est à cause du Dragon. Lorsque j’ai signé le bail de mon studio je n’avais pas vu la clause écrite en tous petits caractères.

- Que dit la clause ?

- Que le bail est à durée illimitée, que je ne peux pas casser de mur, installer une hotte, ni accueillir un chat ou fréquenter un prince. Tout manquement m’expose à prendre comme coloc un dragon. Dans un studio, je te laisse imaginer la scène.

- Mais… Ce n’est pas possible, un avocat doit pouvoir t’aider, j’en connais de très bons qui…

- Non, l’interrompit la jeune fille, tu penses bien que j’ai tout essayé. Je n’ai plus de place pour ranger les chaussures que tu m’offres, alors j’adorerais déménager. Mais le bail est inattaquable.

- Je trouverai un moyen.

 Sur ces entrefaites, le Prince quitta le cinéma d’un pas décidé.

 

 Il disparut dans ses appartements durant de longues journées. On l’entendit faire les cent pas, il réclama du papier pour faire des plans, des livres de stratégie guerrière, puis fit venir un professeur de karaté. Finalement il fit quérir un vieux sage, celui qui semblait tout savoir et qui avait aidé son cousin Petit Prince à retrouver sa belle1.

- Que puis-je faire pour toi Prince ?

- Je dois aller combattre un dragon. Peux-tu m’aider ?

- Le Dragon ? Celui des baux de location ?

- Oui.

- Tu n'auras besoin que de deux choses : ces haricots magiques et un lance-pierre.

- Qu’est-ce qu’ils ont de magique ces haricots ?

- Ils sont bio et ils poussent vite.

- Parfait. J’ai suivi un entraînement au combat au corps à corps, j’ai lu le Prince de Machiavel et j’ai pris une tenue de rechange en cas de victoire pour aller annoncer moi-même à la jeune fille qu’elle est libre. Je suis prêt.

- Bonne chance Prince.

 

 Notre héros partit donc. Son plan était simple : si la menace contre la jeune fille était le Dragon, il devait éliminer le Dragon. CQFD.

 Il marcha longtemps à travers une forêt de pins, puis une forêt de chênes. Il prit un bateau pour traverser la Grande Rivière et un avion pour rejoindre le sommet de la montagne du Dragon.

 A vrai dire, la montagne du Dragon n’en était pas vraiment une. C’était plutôt un volcan. Il fumait en permanence ce qui rendait l’ambiance sinistre et la visibilité moyenne.

 L’avion le largua en parachute au-dessus de la tanière du Dragon parce qu’il ne pouvait pas se poser. Une fois sur la terre ferme, il se débarrassa de son parachute, vérifia qu’il avait toujours son épée, ses haricots magiques et son lance-pierre puis il suivit la route vers le Dragon, avec l’aide de Google Maps. Son téléphone ne lui était cependant pas utile puisqu’il entendait les grognements du Dragon se rapprocher. Il commença à se demander vaguement ce qu’il faisait là au lieu de chercher une nouvelle série à regarder sur Netflix mais il repensa à la jeune fille, à ses grands yeux et à sa douce voix et trouva le courage de continuer son chemin.

 Arrivé devant la maison du Dragon, il s’arrêta, ne sachant pas quoi faire, ses livres de stratégie ne citaient pas le cas des combats contre les créatures légendaires. Devait-il frapper ? Ou simplement crier et le provoquer en duel ? Il choisit finalement la manière douce : il publia une story avec le hashtag : #dragonouestu?

 Une vingtaine de minutes et quelques partages plus tard, il entendit des pas se rapprocher. Il se mit en position, sortit son épée et prit son air le plus menaçant. Il fut surpris de voir que le Dragon, loin d’être une créature immense et effrayante, ressemblait à un vieux dinosaure fatigué, avec des lunettes posées au bout de son museau, comme quelqu’un qui ne voit plus de près.

 Il respecta pourtant la leçon numéro 1 : intimider l’ennemi.

- Ah, tu es enfin là Dragon ! Viens vite, qu’on en finisse !

- Plaît-il ?

- Je suis le prince du royaume d’à côté. Je suis venu pour une histoire de bail qui m’empêche d’être avec ma bien-aimée.

- Cette empêcheuse de tourner en rond ? Elle a déjà envoyé les équipes de Julien Courbet chez moi et elle continue de s’acharner ? Je vais lui expédier mon avocat !

- Elle veut juste mettre fin à ce bail qui l’empêche d’être avec moi.

- Et tu crois que moi j’ai envie de vivre dans un studio avec une fille qui a 150 paires de chaussures ? Je n’y suis pour rien, moi aussi j’ai signé un contrat avec de tous petits caractères.

- Alors avec qui je dois régler mes comptes ?

- Avec Jack. C’est lui qui rédige les contrats.

- Et où est Jack ?

- Avec Charlie.

- Quoi ?

- Rien. Tu vois la petite maison à droite du grand rocher ? C’est chez lui.

 Et le Dragon claqua la porte sans ajouter un mot.

 Le Prince se dirigea vers la maison du fameux Jack en se demandant une nouvelle fois ce qu’il faisait là au lieu d’être tranquillement chez lui.

 Il frappa à la porte.

- Plaît-il ?

- Je suis le prince du royaume d’à côté. Je suis venu pour une histoire de bail qui m’empêche d’être avec ma bien-aimée.

- Vraiment ? Tu n’as pas vu ça avec le Dragon ?

- Si, mais il m’a envoyé chez toi. Il faut annuler ce contrat qui n’a ni queue ni tête.

- Es-tu seulement sûr de vouloir te lancer dans une relation avec cette jeune fille ?

- Évidemment, sinon pourquoi aurais-je fait tout ce chemin ? En plus la seule compagnie qui dessert le volcan est low coast, je ne ferais pas ce sacrifice pour n’importe qui.

- Écoute, je vois que tu es sincère et je veux bien t’aider, mais il me faut une contrepartie.

- Quel genre de contrepartie ?

- J’aimerais développer l’agriculture dans le coin mais peu de plantes supportent le souffre et la chaleur du volcan. Tu as une idée ?

 Le Prince se souvint alors des haricots magiques que lui avait donné le vieillard.

- Tiens, justement, j’ai ici des graines qui devraient te satisfaire. Ce sont des haricots magiques.

- Qu’est-ce qu’ils ont de magique ?

- Ils sont bio et ils poussent vite.

- Ok, on tente.

 Il jeta une des graines par terre et immédiatement, une tige sortit du sol.

- Pas mal. Dis à la jeune fille de déchirer le contrat.

 Et il claque la porte sans ajouter un mot.

 Le Prince reprit gaiement le chemin du royaume, heureux et fier. Il avait réussi sa mission sans coup férir.

 Mais c’était sans compter sur les rebondissements du scénario. Car dès que son esprit acheva de formuler cette idée, il entendit un bruit sourd derrière lui. Il se retourna et ne vit personne. Puis il leva les yeux et fut pris d’une peur qui le cloua sur place.

 Le volcan crachait de la fumée comme une cigarette électronique et de la lave commençait à s’écouler dans un vacarme de fin du monde. Il fallait fuir. Ou bien...

 Le Prince se dit qu’il n’avait qu’une seule chance. Soit ce serait une catastrophe, soit ce serait le coup du siècle. Au lieu de s’éloigner, il courut chez Jack et frappa à la porte comme s’il était poursuivi par le diable, ce qui était un peu le cas. Jack ouvrit la porte tranquillement.

- Mais, tu n’entends pas ? Le volcan est en éruption !

- Je ne suis pas dans une zone inondable par la lave.

- Ah ? Et...

- Ton royaume ? En plein dedans.

- Zut... Dans ce cas, donne-moi des haricots !

- Pour quoi faire ?

- Tu verras.

 Jack lui donna quelques-unes de ses précieuses graines et le Prince s’élança vers le volcan. Il attrapa son lance-pierre, y plaça les haricots et les projeta sur l’orifice dont s’échappait la lave.

 Tout d’abord, il ne se passa rien. Puis il y eut un grondement sourd. La terre se mit à trembler. Le Prince se demanda s’il n’avait pas précipité sa fin et celle de son royaume. Et de la jeune fille. Alors que son cœur se serrait à cette pensée, la fumée cessa de monter. Et à la place c’était... Une tige ! Puis une deuxième. Et encore une ! Bientôt de longues tiges couvertes de feuilles vertes sortirent du volcan, se répandirent le long de ses flancs jusqu’aux pieds du Prince qui n’en croyait pas ses yeux. Et lorsque le bruit cessa, des milliers de fleurs blanches se mirent à éclore.

- ça a marché…

 

 Ému, soulagé mais légèrement incrédule, il cueillit une petite branche fleurie et reprit le chemin du village où tout le monde l’attendait. En effet, chacun avait vu le volcan se réveiller et un exode désordonné avait commencé avant que le bouquet de fleurs de haricot ne commence à couvrir le volcan.

 Il fut fêté en héros, et c’en était un. Mais il resta sourd aux ovations, car le seul avis qui lui importait était celui de la jeune fille. Les villageois s’écartèrent sur son passage tandis qu’il se dirigeait vers elle. Elle portait la jolie robe qui lui allait si bien.

- J’ai compris que quelque chose s’était passé lorsque j’ai reçu un mail concernant des promotions pour des hottes. Je n’en avais jamais reçu jusque-là, commença-t-elle.

- Tu es libre, répondit-il en lui tendant la tige fleurie.

- Pas vraiment…, fit-elle en l’acceptant.

- Comment ça ? demanda-t-il, un peu paniqué.

- J’ai décidé de signer un autre bail... mais avec toi...

 Il tomba assis au sol, submergé par les émotions de la journée.

- Alors je t’informe qu’il est à durée illimitée. Que je suis allergique aux chats. Et que tu n’as pas le droit de fréquenter un autre prince.

- Ça me va !

 

 Fin

 

 

 

 

 

Fleur de haricot


06/02/2020
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Le Royaume aux mille miroirs

La contrainte : écrire une histoire avec les mots patience, peur, problème.

 

 

Il était une fois dans un royaume situé pas loin d’une autoroute passante, un roi connu pour sa magnanimité à gouverner. Le jour où on venait lui présenter des doléances, il écoutait avec la même patience celui qui souhaitait parcourir les mers pour trouver de nouvelles terres à explorer que celui qui se plaignait que la vache du voisin vienne brouter dans son champ. Tous ses sujets étaient importants, et même s’ils ne votaient pas pour lui (parce que c’était le roi), il voulait que tout le monde l’aime.

Il essayait d’apprendre à son fils à marcher sur ses pas, mais n’avait pas réussi dans la mesure prévue. En effet, son fils voulait également que tout le monde l’aime, mais plutôt sur les réseaux sociaux. Il aimait collectionner les likes et passait son temps à prendre des selfies. Il passait notamment beaucoup de temps dans la salle dites des mille miroirs car les murs étaient décorés de miroirs qui donnaient des reflets démultipliés. L’effet en photo était intéressant.

Le roi avait très peur de partir trop tôt eu égard à sa consommation de produits notés en rouge dans Yuka et de laisser son royaume entre les mains malhabiles du prince. Il mit donc au point un plan...

 

Un matin, alors qu’il allait dans la salle des mille miroirs pour prendre son premier selfie de la journée, le Prince vit que tout avait changé. Les miroirs avaient été recouverts par des photos d’inconnus. Certains posaient devant l’objectif et d’autres semblaient avec été photographiés à leur insu, concentré sur une tâche. L’un labourait un champ, l’autre montrait fièrement son code civil, une autre encore tendait un bouquet de fleurs à une cliente en souriant.

- Oh oh, Houston, on a un problème… s’exclama le Prince. Qui sont ces gens ?

- Tu ne les connais pas ? demanda une voix. Le Prince se retourna mais ne vit personne. La voix semblait venir de partout et de nulle part en même temps.

- Non...

- Et pourtant ce sont des sujets du royaume, ils sont tous proches de toi et suivent ton compte Instagram. Ils ont tous liké au moins une de tes photos la semaine dernière.

- Ah ?

- Ici à gauche, tu as Fiona, la fleuriste du royaume. Elle s’occupe de fournir les fleurs pour les mariages, et pour la décoration du palais. C’est à elle que tu as commandé cent roses le jour-même de la Saint Valentin pour faire un Boomerang en jetant des pétales au vent. Et même si tu t’y es pris beaucoup trop tard, elle a honoré ta commande.

- Oh...

- Au centre, cet homme à la mine sévère, c’est Arthur. Sa mission est de jouer le Père Noël pour le Noël des enfants. Tu es monté sur ses genoux bien des fois.

- ...

- Ce cadre décoré, c’est celui de notre joueur de foot vedette. Il nous a fait gagner la dernière coupe des royaumes en marquant à la dernière minute un coup franc de toute beauté.

- ça je l’ai vu !

- Et comment s’appelle-t-il ?

- Heu...

- Je vois...

- Et toi, qui es-tu ?

- Tu es bien curieux d’un coup, toi qui ne t’intéresses pas aux autres.

- Quel est le sens de tout cette mise en scène ?

- C’est à toi de le découvrir.

- Est-ce que je retrouverai les mille miroirs ?

- Tu refroidis...

- Qu’est-ce que je dois faire ?

Mais la voix ne répondit pas. Le Prince était de nouveau seul face à ces visages (presque) inconnus.

 

Il quitta la pièce et sortit du château, contrarié par cette voix qui lui faisait des reproches mais ne lui donnait pas d’indices. Comment pouvait-il connaître tous les sujets du royaume ? Cependant, pourquoi n’en connaissait-il aucun ?

Il marchait sur le petit chemin qui menait au port et donna un coup de pied dans une pierre. Elle atterrit dans les pieds de quelqu’un qu’il n’avait pas vu avant qu’il ne pousse une exclamation qui ne peut pas être transcrite ici.

- %ù# !§& !

- Oups... Désolé...

- Je retire toutes les pierres de mon champ pour ne pas gêner la culture de mes légumes et tu m’en rajoutes ?

- Je n’avais pas vu... Attendez... Vous êtes l’agriculteur du royaume ?

- En biodynamie, oui. Sans glyphosate.

- J’aime beaucoup ce que vous faites...

Il recueillit un sourire et il en fut content. Fidèle à ses habitudes, il proposa à l’agriculteur de faire un selfie avec lui et le tagua.

Il continua son chemin et vit le chalutier qui revenait de sa pêche du jour. Il était entouré de petits bateaux de pêche et tous s’interpellaient joyeusement : la matinée avait été bonne. Sans rien dire, il aida à décharger les cageots de sardines. A la fin de la matinée il sentait le poisson mais les pêcheurs l’avaient remercié avec une tape dans le dos. Il avait ensuite fait un selfie de groupe qui aurait fait pâlir de jalousie Bradley Cooper et avait tagué tout le monde.

En rentrant au château pour prendre une douche bien méritée, il trouva Fiona en train de cueillir des lys sauvages.

- Bonjour Fiona, lança-t-il.

Elle se retourna, les sourcils froncés, apparemment surprise.

- Bonjour...

Agréablement surprise ?

- Tenez, un lys. Vous le donnerez à votre mère, il va éclore d’ici deux jours et parfumera l’air agréablement.

- Merci.

Il fit une série de photos de l’éclosion du lys, dont il censura la fin tragique et il tagua Fiona. La série eut beaucoup de succès.

 

Il retourna dans la pièce aux mille miroirs et vit que les miroirs étaient revenus mais que les photos étaient restées

Il s’assit par terre et se plongea dans une profonde réflexion. C’est dans cette position que le trouva le Roi lorsqu’il entra dans la pièce.

- Et bien mon fils, que t’arrive-t-il ?

- Je réfléchis...

- Je le vois bien, mais à quoi ? Au texte de ta prochaine publication ? A ta liste de hashtags ?

- Non, c’est plus important que ça... Je réfléchis à la morale de toute cette histoire...

- Ah... Le fait de faire davantage attention au monde qui nous entoure ne te parait pas être une bonne option ?

- C’est un peu facile.

- Que proposes-tu ?

- Je dirais... Que les photos c’est bien. Mais penser de temps en temps à les développer, c’est mieux.

Le roi leva les yeux au ciel.

- Oui, c’est cela...

 

 

Fin


15/12/2019
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La Princesse et la Sorcière

 

Il était une fois, dans une contrée pourvue de nombreux points relais aptes à gérer les livraisons 24H et les échanges sans frais, une Princesse à la pointe de la mode. Elle possédait d’innombrables tenues, de la plus casual à la plus sophistiquée, de la plus street style à la plus classique, de la plus sombre à la plus colorée, des chaussures pour toutes les occasions et des accessoires originaux. Pantalons, robes, jupes, blouses, jeans, shorts, combinaisons, sandales, baskets, bottes, bottines, boots, salomées, derbies, escarpins, en cuir, daim, nubuck ou vernis, noir, marron, rouge, jaune, vert, bleu, orange, gris, nude (liste non exhaustive)... tout avait sa place chez elle. Elle avait installé sur son téléphone une ribambelle d’applications lui permettant de trouver LA pièce indispensable et grâce à son compte iGraal, elle convertissait une partie de ses achats, ce qui lui donnait l’impression de gagner de l’argent quand elle en dépensait.

Son dressing était connu à travers le monde, et même Cristina Cordula mourait d’envie qu’elle participe à l’émission Les Reines du Shopping pour pouvoir le voir de plus près.

 

Mais en ce jeudi de novembre, elle avait un problème. Toutes ses tenues étaient soit trop grandes, soit trop petites, ses chaussures étaient toutes dépareillées, ses talons se brisaient au premier pas et ses colliers se cassaient dès qu’elle avait fini de les accrocher. C’était un cauchemar.

En peignoir devant son miroir, elle était partagé entre les larmes et la colère. Elle était perdue. Que faire ? Elle finit par mettre un jean déjà déchiré beaucoup trop large, des baskets dont le lacet se cassa quand elle les mit et qu’elle porta ouvertes et un vieux t-shirt auquel il ne pouvait plus rien arriver.

Elle publia sur Instagram son #OOTD* comme elle le faisait quotidiennement, mais n’en demeura pas moins frustrée. Quelque chose arrivait à son dressing et elle était certaine que la magie n’y était pas étrangère.

 

Son intuition toute féminine était juste. Car non loin de là, la Vilaine Sorcière vit son post Instagram et éclata d’un rire diabolique.

- Ha ha ha, ma vengeance a fonctionné !

En effet, elle avait appris que la semaine précédente, celle qui avait acheté les dernières bottes camel en nubuck en taille 38 sur Sarenza n’était autre que la Princesse. Et elle voulait absolument cette paire de bottes. Il lui semblait que ses sorts seraient plus cruels si elle les portait. Alors elle avait jeté une malédiction sur le dressing de la Princesse, tous ses vêtements avaient changé de taille et elle avait fragilisé ses chaussures. Les fermetures Eclair et les attaches de ses sacs étaient cassées. Cependant, elle épargna son sac de luxe, une pièce intemporelle, par respect pour la Mode.

Néanmoins, en voyant le nombre de mentions J’aime et de commentaires sur la photo de la Princesse, elle se demanda si elle n’avait pas fait une terrible erreur. « quel outfit ! » « super le jean Father’s Boyfriend ! » C’était la photo la plus likée de la semaine.

La satisfaction de l’avoir ensorcelée fut rapidement remplacée par un sentiment d’échec. Même avec un sac poubelle, elle pouvait donc être à la pointe de la mode ? Il lui vint alors une idée.

 

Le lendemain matin, lorsque la Princesse alla à son dressing pour s’habiller, et alors qu’elle croisait les doigts pour que ses tenues aient retrouvé leur esprit, elle vit que tout ses vêtements avaient été remplacés par... des sacs poubelle. De différentes tailles, et de différences couleurs, mais des sacs poubelle malgré tout. Elle soupira, et commença à réfléchir.

Quelques dizaines de minutes plus tard, elle posta sur son compte Instagram une nouvelle photo. Avec un sac noir de 50L dont elle avait coupé le fond, elle avait fait une robe bustier qu’elle noua avec un sac blanc transformée en ceinture. Avec des sacs poubelles 20L de différentes couleurs qu’elle porta superposés en-dessous, elle avait créé un effet volume et coloré qui rappelait les robes à crinoline et à dentelle du 19ème siècle.

Une nouvelle fois, ce fut un énorme succès. « Super initiative écolo ! » « Mieux que le textile recyclé ! » « Sauvons la planète ! » « Recyclons la mode ! » « Stylé ! »

 

La Vilaine Sorcière était hors d’elle. Elle attrapa donc son balai qui fonctionnait encore au diesel, et au mépris de l’interdiction de voler avec sa machine polluante, elle se rendit au château.

Sans tergiverser, elle entra par un des fenêtres du 2ème étage où se trouvait le dressing. La Princesse travaillait sur un modèle de sac à main – poubelle.

- Tu n’as donc aucun respect ? l’attaqua la Sorcière

Les particules fines firent tousser la Princesse.

- Aucun respect ? Pour ?

- Pour la mode et pour moi ! J’essaie de me venger de toi et tout ce que tu arrives à faire, c’est collectionner les likes sur Instagram !

- C’est donc ton œuvre ? Mais pourquoi avoir trafiqué mon dressing ? Je me passerais bien de cette robe-poubelle si j’avais mes fringues classiques mains néanmoins super à la mode !

- Oui c’est mon œuvre. Les bottes Fringantes en nubuck taille 38, ça te dit quelque chose ?

- Effectivement oui, ça me parle...

- Tu as pris la dernière paire !

- Ah... Je comprends ta colère mais ce n’était pas intentionnel... Et je n'aurais pas dû me vanter sur une story d'avoir pris la dernière paire... Mais pour être honnête, je me suis aperçue après le délai de retour qu’elles sont trop grandes pour moi, je les ai mises en vente sur Vinted.

- QUOI ?! Mais je les veux ! Je fais un grand 38 justement !

- Alors elles sont à toi, si le prix te convient. Et si tu annules le sort, parce qu’en l’état, le talon est cassé...

Avant même qu’elle n’ait fini sa phrase, un nuage de fumée de balai magique envahit la pièce. Lorsqu’il se dissipa, elle vit que son dressing était redevenu tel qu’il avait toujours été puis elle reçut une notification sur son téléphone indiquant qu’elle avait vendu un article sur Vinted.

 

Depuis ce jour-là, en l’honneur de la Vilaine Sorcière qui avait fait une excellente affaire, on appela le dernier vendredi de Novembre… le Black Friday.

 

 

Fin !

 

*Outfit Of The Day, tenue du jour


05/08/2019
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La Princesse et le Super-Héros

 Il était une fois, dans un royaume introuvable sur Google Maps, une jolie princesse. Ses parents ayant décidé de prendre leur retraite anticipée à taux plein pour pénibilité, elle dirigeait seule le royaume. Pleine de bon sens, de courage et de volonté, elle prenait de bonnes décisions, fit reculer le chômage, organisa le tri sélectif des déchets et fit la paix avec les royaumes voisins.

 Évidemment, tous ses sujets attendaient avec impatience le jour où elle convolerait en justes noces, comme le voulaient la tradition et la pression sociale. Mais aucun prince ne trouvait grâce à ses yeux. Il manquait toujours l’étincelle qui lui permettrait de ne pas voir tous les défauts humains, inévitables mais supportables uniquement parce qu’ils sont adoucis par l’Amour.

 Un jour, alors qu’elle supervisait les travaux de réfection de l’un des remparts du château, elle entendit un bruit, comme un bourdonnement dans le ciel. Elle leva les yeux et vit un point se rapprocher et devenir de plus en plus gros. Un avion ? Un oiseau ? Une fusée ? Non, c’était… Un homme qui volait ! Il fit plusieurs loopings puis atterrit dans une vague d’applaudissements offerts gratuitement par les villageois qui assistaient à la scène. La Princesse l’observa en haussant le sourcil. En effet, sa tenue était loin d’être banale : une combinaison noire et une cape à reflets argentés. Lorsqu’elle eut fini son examen visuel, elle remarqua qu’il la regardait, comme s’il attendait qu’elle fut disponible pour l’écouter.

 

- Bonjour Princesse

- Bonjour… A qui ai-je l’honneur ?

- Appelle-moi Super-Héros.

- Tout simplement ? Fit-elle, avec un sourire sarcastique.

- Tout simplement, répondit-il sans sembler remarquer le sarcasme.

- Bonjour Super-Héros. Qu’est-ce qui nous vaut le plaisir de ta visite ?

- J’ai entendu parler de ta beauté, de ton intelligence et de ton goût en matière de chaussures depuis l’autre bout du planisphère. Et force est de constater que les rumeurs sont à la hauteur de la réalité.

Cette fois elle fronça les sourcils et ses yeux noisette virèrent au marron très foncé.

- Et ?

- Et… Je venais voir si à tout hasard vous auriez besoin d’un Super-Héros.

- Pour ?

- Pour… convoler en justes noces, comme le veulent la tradition et la pression sociale.

 

 C’en était trop pour la Princesse. Les autres princes avaient la décence d’envoyer un émissaire avant de venir eux-mêmes, ce qui lui permettait de faire le tri et dans 90 % des cas de faire un renvoi sans frais. Super-Héros s’était présenté sans prévenir, il avait fait une demande en mariage maladroite devant la moitié des sujets du royaume et elle avait vu plusieurs smartphones filmer la scène, elle allait donc se retrouver sur les réseaux sociaux en tenue de chantier.

- Je n’ai BESOIN de personne.

 Puis elle partit d’un pas rapide, passablement énervée, vers le château.

 

 Super-Héros, légèrement décontenancé, mais moins qu’un simple être humain dans une situation similaire, décida d’aider les ouvriers à réparer les remparts. Ensuite il transporta les containers à déchets spéciaux à la station de tri, aida les enfants à traverser la rue pour aller à l’école, ramassa les feuilles mortes et sauva un chat coincé dans un arbre.

 La liste de ses réalisations parvint aux oreilles de la Princesse. Étonnée par le mal qu’il se donnait après la façon dont elle l’avait traité, elle l’ajouta sur Instagram. Il lika immédiatement la dernière publications de son fil puis lui envoya un message privé.

 

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 Sur la messagerie Instagram, il ne put pas la voir lever les yeux au ciel, mais elle ne répondit plus. Elle était partie sans dire bonne nuit.

 Décidément, il ne faisait rien comme il le fallait.

 

 Durant les jours qui suivirent, Super-Héros multiplia les actes de bravoure : il répara les caténaires de la seule ligne de métro du royaume qui céda pendant les heures de pointe, nettoya le haut-parleur qui crachait des informations incompréhensibles aux voyageurs et marqua le but de la victoire dans le tournoi de football inter-royaumes. Un fan créa une page Youtube dont les vidéos recensait ses exploits et très vite, elles devinrent virales. Il était ovationné partout où il allait.


  Cette popularité commença à agacer la Princesse. S’il continuait ainsi, il allait finir par lui prendre sa place dans le cœur de ses loyaux sujets (ce qui constituait évidemment une crainte sans fondement, mais cela, elle l’ignorait).

  Il fallait qu’elle fasse quelque chose.

 

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 Cette fois c’est lui qui se déconnecta sans dire bonne nuit.

 

 Le lendemain, aucune photo ne fut publiée sur le compte Instagram de Super-Héros. Et s’il disparaissait des réseaux sociaux, c’était comme s’il avait disparu de la vie réelle. La Princesse commença à s’inquiéter. Qu’avait-elle fait ? Était-ce si grave de lui avoir dit qu’elle ne cherchait pas un super-héros, mais juste une personne normale ? Lui avait-elle demandé de renoncer à une partie trop importante de ce qu’il était ? Avait-elle été trop dure ?

 

 Le jour suivant, quelqu’un se présenta à la cour, sans tambour, ni trompette. Un jeune homme à l’allure un peu quelconque, vêtu d’un jean, d’un t-shirt blanc et de baskets portant le nom d'un célèbre joueur de tennis. Il vint les mains dans les poches, mais le sourire aux lèvres.

- Salut Princesse.

- Salut. Vous êtes ?

 Il sourit avant de répondre.

- Tu ne me reconnais pas ?

 Elle l’observa un instant car effectivement, il ne lui était pas tout à fait inconnu. Puis en un éclair, les pièces du puzzle se mirent en place. Il était vrai que sans la cape, il était méconnaissable.

- Super-Héros ???

- Non, pas Héros. En réalité, je suis juste super.

 Elle sourit à son tour car même si elle ignorait pourquoi, elle sut avec certitude qu’il disait vrai.

- Et c’est déjà beaucoup...

 

 

Fin

 

 

https://youtu.be/FM7MFYoylVs


11/07/2019
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La fillette et le vieil homme

 

  Il était une fois, dans de lointaines montagnes, une petite fille solitaire. Bien qu’elle avait une grande famille, constituée de ses parents, ses frères et sœurs, ses oncles, tantes et cousins qui vivaient tous ensemble, elle aimait être seule. Lorsqu’on la cherchait pour une raison ou pour une autre, elle se trouvait souvent près de la rivière, perchée sur un arbre ou bien dans la grange à l’abri du bruit et du tumulte. Elle était gentille, serviable, mais si sa présence n’était pas requise, elle aimait être là où les autres n’étaient pas.

 

  Dans le même village vivait un vieil homme. Il était poli, rendait service quand il le pouvait, mais il passait le plus clair de son temps seul, à pêcher dans la rivière. Quand on lui demandait s’il ne s’ennuyait pas, il répondait que les poissons lui tenaient compagnie. Si certains sous-entendaient qu’il n’avait peut-être pas toute sa tête, la plupart des villageois haussaient les épaules. Après tout, il ne dérangeait personne.

 

  Un jour qu’il se trouvait assis au bord de la rivière, sa canne à pêche dans les mains, la petite fille arriva. Voyant que les lieux étaient occupés, elle s’arrêta net. Elle était contrariée parce que le vieux monsieur lui avait pris le meilleur spot, le plus instagrammable des environs, avec la dose parfaite de verdure, de montagne, d’ombre et de soleil. Elle s’approcha malgré tout. Et c’est lui qui fut contrarié : ses pas dans l’herbe faisaient fuir les poissons.

  - Comment une si petite fille peut-elle faire autant de bruit ? On dirait un éléphant dans un magasin de porcelaine !

  - Vous exagérez, mes Stan Smith ne font pas un son !

  - Va donc dire ça aux poissons.

  - Les poissons n’ont pas d’oreilles.

  - Peut-être mais ils sentent quand ils sont dérangés.

  - C’est peut-être l’hameçon et son piège grossier qui les dérangent.

  Le vieil homme haussa le sourcil. Voilà une fillette bien effrontée... Il décida de changer de tactique.

  - Comment se fait-il que tu erres toute seule près de la rivière ? Ce n’est pas très raisonnable de se promener au bord de l’eau.

  - Pas d’inquiétude, j’ai appris à nager, j’ai vu énormément de tutos YouTube avant de me lancer.

  - Des quoi sur quoi ?!

  - Des cours en vidéos.

  - Ah. Tu aurais pu le dire comme ça.

  - J’aurais pu oui. En 1999.

  Il leva les yeux au ciel. Elle s’assit en essayant de faire le moins de bruit. Ils passèrent l’après-midi dans le silence le plus absolu, conscient de la présence l’un de l’autre sans pour autant en être gêné. Lorsque le soleil se mit à décliner, le vieil homme se leva, ramassa ses affaires, puis partit sans un mot.

  La fillette resta un moment près de la rivière, lança quelques cailloux dans l’eau pour conjurer ces heures de silence, puis entendit sa mère l’appeler. Pour elle aussi, il était temps de rentrer.

 

  Le lendemain, elle trouva de nouveau le vieil homme à sa place. Cette fois, elle se glissa près de lui sans bruit et vaqua à ses silencieuses occupations : regarder la rivière, observer le ciel, faire une sieste dans l’herbe, prendre des selfies. Lorsqu’elle sortit sa liseuse, il lui demanda à quoi servait cette plaque lumineuse. Elle lui expliqua le principe du e-book, qui lui plut beaucoup. Il lui emprunta sa tablette, et lorsqu’elle lui opposa qu’elle n’avait plus rien à lire, il lui prêta son livre. Elle aima ce concept qui lui permettait de savoir où elle en était dans sa lecture, et de souligner les passages qui lui plaisaient particulièrement.

  A l’heure du goûter, il lui offrit des petit-beurre et elle des Oréos. Chacun fut ravi. Le lendemain, il lui donna des Pépitos et elle des Granolas. Leurs subtiles différences les firent sourire.

  Leur relation était devenue cordiale mais ils parlaient peu. Jusqu’au jour où la petite fille vint en pleurs.

  - Qu’est ce qui se passe ?

  - Rien. Je n’ai pas envie de parler.

  - Très bien...

  - Mais vous, vous pouvez parler. J’ai oublié de prendre mon IPod, ça me changera les idées.

  - Qu’est-ce que tu veux que je te dise ?

  - Ce que vous voulez. Racontez-moi une histoire.

  Alors contrairement à ses habitudes, il parla. Il lui raconta l’histoire d’un petit garçon espiègle qu’elle le soupçonnait d’avoir été. Fascinée, elle ne l’interrompit pas, et ce n’est qu’à la fin de l’histoire qu’elle se rendit compte que ses problèmes n’étaient plus si graves.

  Les jours suivants, bien qu’elle ne soit pas en larmes, il continua de lui raconter des histoires, parfois tristes, parfois drôles, mais toujours inattendues. Il était aussi content de parler qu’elle l’était d’écouter.

 

  Mais un jour, la fillette ne vit pas le vieil homme à son endroit habituel. Ni le lendemain. Ni le jour d’après. Bien que personne ne lui ait rien dit, elle savait qu’il ne reviendrait plus...

Elle cessa d’aller seule à la rivière et presque sans s’en rendre compte, pour passer le temps, elle se mit à raconter des histoires aux enfants de la famille. D’abord celles du vieil homme, puis celles qu’elle inventa. Très vite, les adultes de la famille s’ajoutèrent à son public, et bientôt les villageois se mirent à venir l’écouter. Sa notoriété fit le tour des villages alentours.

 

  Bien que le vieil homme ait laissé un vide, elle ne fut plus jamais seule.

 

  Nanou

 


10/06/2019
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